Monsieur le Président de la République
L’invitation que vous nous avez adressée pour participer au Conseil national de la Refondation (CNR) a retenu toute notre attention.
La référence à l‘histoire et au Conseil national de la Résistance (CNR) dans le choix de la dénomination de cette nouvelle instance ne nous a évidemment pas échappé. Toutefois, nous nous interrogeons sur la manière dont ce nouveau Conseil pourrait dégager des perspectives de progrès social, comme cela fut le cas à la Libération. En effet, dès l’annonce de la mise en place de ce comité, nous avons exprimé de forts doutes sur sa capacité à construire des réponses aux nombreux défis et attentes qu’expriment les salariés, notamment sur les salaires et l’emploi.
Rassemblant les forces politiques, économiques, sociales et associatives, des élus des territoires et des citoyens tirés au sort, la composition de ce comité extrêmement large risque, à notre sens, de diluer la parole des organisations syndicales et d’affaiblir le rôle des acteurs sociaux. FO considère qu’elle n’a pas sa place dans un telle instance.
En outre, le CNR tend, sinon à se substituer, à tout le moins affaiblir la place et le rôle du CESE par sa composition, mais également par son mode de fonctionnement et sa finalité. En effet, le CESE « fonde son travail sur l’écoute, le dialogue et la recherche d’un consensus exigeant pour répondre aux enjeux d’aujourd’hui et de demain et éclairer la décision publique ». Or, Force ouvrière est historiquement partie prenante et attachée au rôle que doit jouer cette institution, comme conseil consultatif auprès des pouvoirs exécutifs et parlementaires, et à ce titre lieu de débat libre et approfondi sur les questions économiques, sociales et environnementales.
Force ouvrière ne saurait se trouver associée à un travail d’élaboration d’un diagnostic partagé et/ou de co-construction de réformes législatives en dehors du Parlement. FO a toujours contesté les tentatives de dilution des syndicats dans une forme de démocratie dite participative venant concurrencer la démocratie parlementaire et assimilant les interlocuteurs sociaux au législateur. FO réitère son attachement à la séparation entre le champ politique et le champ syndical et ne peut pas s’associer à un projet visant à faire du syndicat un colégislateur.
FO rappelle qu’une telle orientation avait conduit la confédération, revendiquant que demeure le caractère consultatif du CESE, à appeler à voter non au referendum de 1969 qui projetait la fusion du CES avec le Sénat.
Ce sont les raisons pour lesquelles FO ne participera pas au Conseil national de la Refondation. Pour autant, cela ne signifie pas que FO refuse de dialoguer. Bien au contraire, pour FO, l’indépendance syndicale est à la base de toute action syndicale dont la pratique contractuelle, est un des outils essentiels. Nous vous demandons de redonner la place qui est la sienne à la négociation collective, au sens de l’article L1 du Code du travail. FO agit et continuera d’agir dans un esprit de dialogue et de responsabilité pour faire part de ses positions et de ses revendications dans les lieux dédiés au dialogue social, au paritarisme, et à la négociation collective.
Je vous prie de recevoir, Monsieur le Président de la République française, l’expression de ma très haute considération.